le Vendredi 16 jan 2009


La régularité du calendrier a souvent des effets contradictoires. Elle assure, d’une part, le retour codifié d’une date ou de la célébration d’un événement. On n’oublie pas ! Elle risque d’autre part, d’inscrire, dans la banalité de l’écoulement du temps une actualité qui revient, chaque année à la même date.

 

            C’est ainsi que, chaque année, dès l’achèvement du cycle des fêtes de la Nativité de Jésus, nous entrons, le 18 janvier, dans la semaine de prière pour l’unité des Chrétiens. Nous vivrons un temps fort de la démarche œcuménique.

 

            Dans une société qui se réfère, de moins en moins, à des repères chrétiens, la notion d’œcuménisme est devenue très floue. Le mot lui-même est utilisé pour désigner des réalités diverses, y compris, d’ailleurs, dans le cercle des Chrétiens. Dès que des personnes qui affichent entre elles des différences se retrouvent, se rassemblent, ne serait-ce que ponctuellement, il est question d’œcuménisme. Dans le langage courant, l’œcuménisme peut donc être, ici, de nature politique, là, d’ordre social, pour ne prendre que ces exemples.

 

Le même terme qualifie souvent, aujourd’hui, tout contact entre des représentants de diverses religions. Dans les esprits, la distinction entre le dialogue inter-religieux et l’œcuménisme s’opère de plus en plus difficilement. Il n’est, sans doute, pas inutile de rappeler que, dans la tradition chrétienne, l’œcuménisme désigne les relations entre les Eglises qui, par divisions successives, ont brisé l’unité de l’unique Eglise de Jésus-Christ.

 

Nous nous sommes trop habitués à cette dure réalité. Qu’on le veuille ou non, elle porte atteinte, aux yeux de l’humanité, à la crédibilité du message que l’Eglise est appelée à transmettre au monde. Les scènes de rivalité, les déchirements historiques et l’utilisation des religions à des fins qui leur sont étrangères posent aujourd’hui de sérieuses questions. Elles apportent de l’eau au moulin de celles et de ceux qui affirment, un peu vite sans doute, que les religions sont nuisibles puisqu’elles engendrent ou entretiennent des antagonismes qui opposent jusqu’à la violence, des personnes, des groupes, des nations. On s’en aperçoit jusqu’à l’intérieur de la basilique du Saint Sépulcre de Jérusalem !

 

L’histoire ne se réécrit pas en quelques pages. Elle ne se gomme pas par quelques gestes. Nous ne ferons pas davantage progresser l’œcuménisme en faisant comme si nous n’étions pas séparés. Nous n’en sommes plus à l’époque où les bons – nous, bien sûr – jugeaient les méchants – les autres évidemment – Il suffisait alors que les schismatiques reconnaissent leurs erreurs et rentrent dans le rang. Le problème de l’unité de l’Eglise serait alors réglé.

 

 

 

Le concile Vatican II, précédé, d’ailleurs, par des approches décisives en matière d’œcuménisme, les réflexions du pape Jean-Paul II pendant le jubilé de l’an 2000 ont reconnu, sans remettre en cause la sainteté de l’Eglise, que les Catholiques portaient leur part de responsabilité dans les divisions. Il leur faut les assumer. Les textes du magistère sont explicites à ce sujet : « Les ruptures qui blessent l’unité du Corps du Christ … ne se font pas sans les péchés des hommes. » [1]

 

Nous savons mieux aujourd’hui que l’unité de l’Eglise ne peut pas être le fruit d’arrangements et de compromis. Sans doute, et nous le verrons plus bas, les personnes, les communautés et les Eglises doivent-elles s’investir dans l’œcuménisme. Il implique des engagements, des rencontres, des faits et des gestes, mais nous ne pourrons jamais oublier que « Le désir de retrouver l’unité de tous les chrétiens est un don du Christ et un appel de l’Esprit Saint. »[2]

 

J’évoque volontiers, ici, les suggestions que le Catéchisme de l’Eglise Catholique, à l’article 821, emprunte à d’autres documents. Elles constituent une sorte de programme de l’engagement œcuménique qui nécessite

 

-                     un renouveau permanent de l’Eglise dans une fidélité plus grande à sa vocation. Cette rénovation est le ressort du mouvement vers l’unité ;

-                     la conversion du cœur « en vue de vivre plus purement selon l’Evangile », car c’est l’infidélité des membres au don du Christ qui cause les divisions ;

-                     la prière en commun, car « la conversion du cœur et la sainteté de vie, unies aux prières publiques et privées pour l’unité des Chrétiens, doivent être regardées comme l’âme de tout oecuménisme et peuvent être, à bon droit, appelées œcuménisme spirituel » ;

-                     la connaissance réciproque fraternelle ;

-                     la formation œcuménique des fidèles et spécialement des prêtres ;

-                     le dialogue entre les théologiens et les rencontres entre les chrétiens des différentes Eglises et communautés ;

-                     la collaboration entre chrétiens dans les divers domaines du service des hommes.

 

 

Le service diocésain de l’œcuménisme que je remercie a communiqué quelques éléments qui apportent aux communautés des moyens concrets de vivre un temps fort entre frères d’Eglises séparées. Nous devons, bien sûr, savourer les joies de ces préoccupations et de ces retrouvailles annuelles.

 

Revenant au point de départ, je souhaite que l’intensité d’une semaine ne soit pas immédiatement oubliée au bénéfice d’activités qui sont déjà programmées après le 25 janvier. Ne nous quittons pas en nous disant « A l’année prochaine ! » L’œcuménisme fait partie du quotidien de la vie et de la mission de l’Eglise.

 

+ Jean-Paul JAEGER



[1] Code de droit canonique – canon 751.
[2] Unitatis redintegratio § 1.